Une des clefs expliquant la « radicalisation » de l’islam au Moyen-Orient, au Maghreb et les tentatives de radicalisation des communautés musulmanes en Europe et l’une des « clefs » du conflit Syrien, la confrérie des Frères Musulmans qu’on connaît évidemment en Egypte est une véritable « internationale islamiste » qui fournissait nombre de clefs sur l’évolution des « printemps Arabes » de 2011.





Les Frères Musulmans, leurs filiales, les partis membres ou amis existeraient dans plus de 80 pays dans le monde. N’ayant pas de connaissances particulières sur plusieurs des pays cités, il s’agit d’une recherche Internet basée sur une multitude de sites.
Egypte, naissance des frères musulmans
La confrérie des frères musulmans (FM) est une organisation panislamiste fondée en 1928 par Hassan el-Banna, avec comme objectif une renaissance islamique, la lutte contre l’influence occidentale, la laïcité et l’instauration d’un état islamique fondé sur les principes de la Chaaria. Elle a rapidement essaimé ses idées dans les pays à majorité musulmane du Moyen-Orient, en Afrique du Nord, et a établi des « têtes de pont » jusqu’en Europe. Certains groupes de partisans se sont constitués en mouvements autonomes, comme le Jama’a al-islamiya au Liban ou le Hamas à Gaza.Le mot d’ordre de l’organisation est : « Allah est notre objectif. Le prophète Mahomet est notre chef. Le Coran est notre loi. Le djihad est notre voie. ».Son opposition parfois violente aux États laïcs arabes a amené son interdiction ou la limitation de ses activités dans certains pays comme la Syrie et l’Égypte. La lutte contre l’État d’Israël est au cœur du mouvement depuis sa fondation. Le mouvement entretient avec les institutions promouvant le wahhabisme saoudien des relations alternant entre coopération et rivalité. La nébuleuse des Frères musulmans serait coordonnée par la Muslim Association of Britain de Londres, s’appuyant sur la banque Al-Taqwa. Néanmoins elle ne constituerait pas une structure pyramidale centralisée mais une mouvance hétérogène et multiforme. Lors du premier congrès du parti en 1933, l’organisation comptait 2 000 militants, un an plus tard ils sont 40 000, et en 1943 la confrérie compte plus de 200 000 militants.

Interdictions et dissolutions
En 1948, le 28 décembre, l’« appareil secret » de l’organisation assassine le Premier ministre égyptien. En représailles, l’organisation est interdite et son fondateur Hassan el-Banna est assassiné par les agents du gouvernement en février 1949. En 1954, Nasser, qui craint pour sa personne, décide à nouveau d’interdire l’organisation. Près de 20 000 militants sont incarcérés. Dans les années 1970, Sadate utilise les Frères musulmans pour faire contrepoids à l’extrême gauche et il leur promet l’intégration future de la charia dans les lois égyptiennes. En 1978, ils renoncent officiellement au soutien des actions violentes, à l’exception du combat en Palestine. Cependant, certains partisans qui ne partagent pas cette position se regroupent dans d’autres structures, comme la al-Gama’a al-islamiyya (Groupe islamique). En 1981, l’un de ses membres assassine Sadate. Ils sont également les auteurs d’attentats contre des touristes en 1992 et de Louxor en 1993. Dès le début des années 1980 un bras armé clandestin se constitue. Certains de ses membres tentent d’infiltrer les institutions gouvernementales, mais le régime laïque d’Hosni Moubarak fait obstacle à la plupart des manœuvres politiques, à l’exception notable de certains syndicats actuellement infiltrés de toutes parts, comme celui des avocats. En 1982, les organes de presse des Frères sont détruits et la quasi-totalité de leurs publications saisies. L’organisation reste interdite mais paradoxalement est tolérée. En 1984, le pouvoir reconnait à la confrérie le statut d’organisation religieuse, mais refuse sa participation à la vie politique. Les candidats fréristes participent aux élections comme indépendants ou comme représentants d’autres partis. L’organisation s’efforce d’être présente sur le terrain en aidant les classes défavorisées autant sur le plan social que financier, fournissant, entre autres, aux personnes dans le besoin des médicaments ou des prêts d’argent. Certains, dont Saïd Ramadan, après avoir tâté le terrain dans les pays arabes avoisinants, optent finalement pour l’Europe comme lieu d’implantation de leurs nouvelles bases, avec l’aide financière des Saoudiens.


Le pouvoir égyptien et la politique de la carotte et du bâton
Dans les années 1990, en Égypte, la confrérie s’affiche publiquement comme un mouvement respectueux de la démocratie. Elle publie trois manifestes importants sur « l’indispensable démocratie », sur les droits des minorités, notamment de « nos frères et compatriotes coptes » et sur « le statut de la femme ». Bien que disposant officieusement de 88 députés (sur 454) à l’Assemblée du peuple entre 2005 et 2010 (ce qui fait d’eux le premier groupe d’opposition), les Frères musulmans qui font passer un message religieux (islamisation des mœurs, de l’habillement et de la culture) relayé par un important réseau de membres et d’actions caritatives, largement adopté par la société, ne peuvent pas concrétiser cette sympathie en succès politique. Ce handicap résulte du refus du pouvoir égyptien d’assister à la création d’un parti politique des Frères musulmans et au rejet des règles du jeu démocratique de la part de certains membres de la confrérie.Le pouvoir égyptien mène une politique de la carotte et du bâton, relâchant de temps en temps la pression pour l’utiliser comme soupape à la colère populaire contre les politiques israéliennes et américaines au Proche-Orient, puis en resserrant la vis en arrêtant, en torturant ou en éliminant plusieurs des membres de la confrérie.
Habillé en costume à l’occidentale
Pour conquérir le pouvoir les Frères musulmans ont appliqué une véritable métamorphose. La plupart des membres de la confrérie ont fait un important travail au niveau de leur apparence vestimentaire et physique. Habillé en costume à l’occidentale, ils sont soit complètement rasés, soit portent une barbe finement taillée. Ils sont pour beaucoup issus des hautes écoles, parlent tous plusieurs langues étrangères et se présentent désormais en démocrates. Tous les candidats aux élections législatives du mouvement ont bénéficié d’une formation intensive aux techniques de communication, aux stratégies de persuasion et à l’art des négociations. Officiellement, le mouvement a abandonné tout projet d’État théocratique, ils disent prendre comme modèle les mouvements islamistes marocains qui sont connus pour leur pragmatisme. Ce, même si beaucoup de politologues et de journalistes en doutent, et émettent l’idée qu’ils aient mis fin momentanément à leur projet de république théocratique pour ne pas faire peur aux Égyptiens et prendre le pouvoir sans trop de violence. Lors des élections de 2010, ils sont marginalisés par des fraudes massives, et boycottent le second tour. Dans le paysage politique post-Moubarak, selon un sondage publié en avril 2011, 75 % de la population a une opinion « plutôt » ou « très favorable » des Frères.
Les tendances à l’éclatement du courant islamiste, déjà présentes sous le régime de la dictature, se renforcent après la révolution de 2011 . L’aile modernisatrice et libérale se sépare des Frères en 1996 pour créer le parti Al-Wasat . Les musulmans salafistes, plus rigoristes, possèdent leur propre parti, Al-Nour . Le parti des Frères musulmans, le « parti de la Liberté et de la Justice », créé le 6 juin, tient à l’écart les femmes et les jeunes, pourtant moteurs de la révolution du 25 janvier. Le 20 janvier 2012, le parti de la Liberté et de la Justice, dirigé par Mohamed Morsi, remporte les élections législatives. Le 3 juillet 2013, le président Morsi est renversé par l’armée après des jours de manifestations populaires dans tout le pays et de nombreux dirigeants du PLJ et des Frères musulmans sont arrêtés par l’armée. Le 18 août 2013, le premier ministre du gouvernement d’intérim, Hazem El-Beblaoui, propose leur dissolution. Le 20 août, le guide suprême des Frères musulmans Mohammed Badie est arrêté et placé en détention provisoire pour « incitation au meurtre ».
En Algérie
Le courant islamique principal en Algérie, appelé « Frères Musulmans », en est un modéré et traditionnel. Avec Le Djihad Islamique et le Mouvement pour la Démocratie en Algérie, il fait partie des trois groupes intégristes les plus importants en Algérie. Dirigés par des figures telles, Sheikh Sahnoun, ancien membre de l’Association algérienne des Ulémas, Dr. Abbasi Madani, docteur en Sociologie et Sheikh Mahfoud, jeune chef charismatique, les Frères Musulmans d’Algérie sont à l’origine de la violence en Algérie .En fait, un événement sanglant a été mené par, Mustapha Bouiali a été la première étincelle qui a mené le pays vers une guérilla contre le pouvoir (militaires, gendarmes, policiers ,intellectuels et civils ) causant ainsi des milliers de morts . Bouiali a été arrêté et tué en 1987 par les forces militaires. Ce groupe qui rejette le nom de « Frères Musulmans », par contre, son idéologie et ses objectifs: instauration de la sharia ou Loi islamique, abolition des coutumes occidentales et arabisation. En 1988, la résurgence du courant islamique en Algérie, provoquée par une déculturation coloniale, une rigidité politique et par l’accentuation de la crise économique inquiétait les autorités du pays. Par contre, le soulèvement populaire d’octobre 1988, qui n’a pas été initié par les frères musulmans a servi ces derniers.
Les FM sont encore à l’origine de la création en 1989, par Abassi Madani et Ali Benhadj deux membres des FM, de la création du FIS qui remporta les élections municipales de 1990 puis les élections législative de 1991. Ces élections furent annulées, et en juin 1991, Abassi Madani lance son premier appel au djihad (lutte armée) qui se poursuivi par la « décennie noire » Algérienne. Abassi Madani et Ali Benhadj étaient pour l’application de la Chaaria en cas de victoire du FIS. En juillet 1997, Madani est relâché de prison, mais réemprisonné lorsque l’on découvre qu’il soutient encore la lutte armée du GIA et de l’AIS. Il est relâché en juillet 2003, sous la présidence de Bouteflika et lance un appel à la fin de la lutte armée le 25 août 2003 puis va en Arabie saoudite, en Malaisie et au Qatar. Le fils d’Ali Benhadj, Abdelkahar Benhadj, membre d’Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), aurait été tué le 25 juillet 2011 alors qu’il préparait un attentat.
En Tunisie
Rached Ghannouchi est le Chef d’Ennahda, organisation considérée comme très proches des FM dont elle reproduit la stratégie de conquête du pouvoir. Conformément à la confrérie, très tôt Ennahda tient des discours multiples en fonction de ses interlocuteurs : Elle s’efforce de se présenter comme un mouvement religieux modéré, ses leaders sont habillés à l’occidentale et elle se revendique d’une action démocratique alors qu’en sous-main elle manipule les mouvements plus extrémistes, leur confirmant son objectif de l’instauration du Califat. Le 22 janvier 2011, dans une interview donnée à Al Jazeera, Ghannouchi affirmait qu’il était hostile à un califat islamique et soutenait la démocratie. En Juillet 2013, s’est tenue à Istanbul, en Turquie, la conférence internationale des Frères musulmans. L’organisation internationale des Frères musulmans a élu Rached Ghannouchi, président du bureau politique de l’organisation, devenant ainsi le numéro 2 au sein de cette organisation mondiale.
En Syrie
En Syrie, le mouvement a été fondé dans les années 1930 par des étudiants, anciens membres des Frères musulmans égyptiens. La confrérie est la principale force d’opposition au régime baassiste et elle est surtout présente dans les grandes villes du pays (Hama, Homs et Damas) ou les classes populaires forment le gros des effectifs du parti. À la fin des années 1970, le mouvement initie une lutte armée contre le régime baasiste, organisant des attentats. Une répression sanglante par le régime de Hafez el-Assad. En 1982, les Frères musulmans tentent de soulever la population contre le président Hafez el-Assad. Il élimine à Hama, le bras armé des Frères musulmans, (l’Avant-garde combattante) dont les militants se dispersent en Arabie saoudite, en Jordanie, au Koweït ainsi qu’en Afghanistan. Les Frères musulmans restent en 2007 hors la loi dans ce pays. En juillet 1980, la loi n° 49 – toujours en vigueur- stipule qu’« est considéré comme criminel et sera puni de la peine capitale quiconque est affilié à l’organisation de la communauté des Frères musulmans. »
Le 17 mars 2006, les Frères musulmans syriens créent à Bruxelles avec le vice-président syrien ayant fait défection, un Front de Salut National auquel adhèrent aussi des opposants arabes et kurdes venus de divers partis. En 2009, au moment de la guerre de Gaza, la confrérie conclut une trêve avec le pouvoir syrien. Mais en juillet 2010, le leader syrien des Frères musulmans rompt la trêve avec le régime. La confrérie n’est plus aujourd’hui une force politique en Syrie, mais elle maintient néanmoins un réseau d’appuis mené depuis Londres et Chypre, sa direction se situant à Istanbul.
Les Frères en Palestine
En 1935, l’organisation rentre en contact avec Amin al-Husseini, le grand mufti de Jérusalem (qui se compromettra pendant la 2ème guerre mondiale avec les nazis) et participe à l’insurrection arabe de Palestine de 1936. En 1945, Saïd Ramadan (fils spirituel du fondateur des FM) crée une branche armée arabe de Palestine du mouvement, qui a pour objectif de combattre le mouvement sioniste. Les Frères musulmans connaissent ainsi un succès fulgurant et de nombreux militants participent à la guerre de 1948-1949 contre le jeune État d’Israël. À partir du milieu des années 1960, les Frères musulmans redeviennent actifs en Israël. Après la restitution de la bande de Gaza, la confrérie se développe, met en place un réseau d’aide social et fait construire l’Université islamique de Gaza. Le Mouvement de la résistance islamique (Hamas) est créé en 1987, il est précisé dans la charte du Hamas que « le Mouvement de la résistance islamique est l’une des ailes des Frères musulmans en Palestine ». Le parti participe aux élections législatives de 2006 et promet de rétablir la sécurité, et de débarrasser le pays de la corruption. Le Hamas gagne les élections avec 74 sièges contre 45 pour le Fatah. Un nouveau gouvernement de l’autorité palestinienne est formé et Ismaël Haniyeh (Président du Hamas) en devient son Premier ministre. Néanmoins, celui-ci ainsi que son gouvernement sont évincé par le président Mahmoud Abbas en juin 2007, lorsque les forces armées du Hamas prennent par la force le contrôle de la bande de Gaza.
En Turquie
En Turquie, le Parti de la Prospérité crée en 1983 (transformé par la suite en Parti de la vertu) est considéré comme un parti membre ou ami des FM. Recep Tayyip Erdoğan qui a étudié dans une école religieuse qui forme des imams adhère dans les années 70 à l’Organisation de jeunesse du Parti du Salut national, le MSP, parti islamiste alors dirigé par Necmettin Erbakan.Il le suit à la création du Parti de la Prospérité. En 2001, Erdogan fonde le Parti de la Justice et du développement) avec l’aile dite « modérée » du parti de la prospérité et remporte les élections en 2002. A l’époque, la large victoire de ce parti issu de l’islam politique, dans un pays laïc sous tutelle militaire, est un choc (tous les partis islamistes précédents ont été successivement interdits). Erdogan se prononce en faveur d’une séparation de l’État et de la religion (en Turquie, les imams sont des fonctionnaires affiliés au directorat des Affaires religieuses, lui-même dépendant directement du Premier ministre. La religion est donc contrôlée par l’Etat). Sa position s’oppose donc en partie à la laïcité turque. Considéré comme l’homme politique le plus populaire de Turquie, Erdoğan est cependant considéré par nombre d’intellectuels comme un despote qui fait sauter un à un les verrous de la laïcité afin d’instaurer un régime islamiste et personnel. Il applique un programme islamiste, en particulier depuis 2011 et affaibli l’influence kémaliste de l’armée turque. Au printemps 2012, il soumet un projet de constitution visant à instaurer un régime présidentiel qui conduit à une importante concentration des pouvoirs. Au printemps 2013, un projet de modification d’une place entraîne des manifestations dont la répression brutale entraîne l’extension. La destitution du président Morsi (dont il était l’ami) affecte considérablement Erdogan.
Les frères d’ Al-Qaïda
A partir des années 70 (alors qu’officiellement les FM avaient renoncé à la violence) les membres qui ne sont plus d’accord avec la direction prise, donnent naissance à une nébuleuse : dans de nombreux pays, de petites organisations violentes pratiquant le terrorisme. Les FM sont ainsi à l’origine du « Djihad islamique Egyptien », groupe terroriste crée dans les années 70 dont « Ayman al-Zaouahiri », Frère depuis l’âge de 14 ans – médecin de formation – prend la tête. Il est arrêté à la suite de l’assassinat du président égyptien Anouar el-Sadate dont son organisation est considérée comme responsable, mais est relâché, son implication n’ayant pas pu être prouvé. Il part pour l’Afghanistan et y rencontre « Abdullah Azzam », palestinien, membre reconnu des Frères, toujours soutenu par la confrérie et considéré probablement comme le véritable fondateur d’Al Qaïda. Par son intermédiaire il rencontre Oussama ben Laden. Les 3 hommes posent les bases d’une organisation sous forme de nébuleuse, d’une avant-garde chargée de l’islamisation du monde. Al-Qaïda est née. L’organisation de Ayman al-Zaouahiri, « le Djihad islamique Egyptien », fusionna avec Al-Qaïda et il devint le n° 2.A la mort d’Oussama ben Laden, il en devient le chef.
Source :
Gérard Dahan, Sociologue, économiste

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