18 juin, 2013
Depuis plus de dix ans, Mourad Hammami, qui vit à Tigzirt dans la wilaya de Tizi Ouzou, ne cesse de s’adonner à sa passion. Il s’est investi à cœur joie dans le domaine de l’audiovisuel. Après avoir produit un documentaire pour promouvoir sa ville à vocation touristique, «Tigzirt, entre ciel et mer», Mourad Hammami s’est intéressé à plusieurs sujets avant de se pencher sur la guerre de Libération nationale en tendant le micro aux anciens maquisards qui ont libéré notre pays du joug colonial. Mourad Hammami est aussi le réalisateur de documentaires sur les chouhada et chefs de guerre Amar Bessalah, dit Amar El Bass, El Mohab dit Oujedouh et bien d’autres.
 
Qui est Mourad Hammami ?
Je suis âgé de 39 ans. A la base, je travaille depuis 14 ans comme professeur en économie et gestion dans un Institut national spécialisé de la formation professionnelle. Je suis également correspondant journaliste dans la presse écrite depuis 2001, à ce jour. Je suis directeur et fondateur de l’entreprise de communication et de production audiovisuelle Mizrana Production. Je suis également président et membre fondateur de l’association le Flambeau de Tizi-Ouzou. Actuellement, nous sommes sur un projet de création d’une nouvelle association de culture et de communication.

Justement depuis la création de votre entreprise Mizrana Production, les choses avancent-elles  sur le terrain ?
Oui, on avance graduellement. Le terrain est si difficile, mais la volonté et la passion sont là. Nous souhaitons que cette année soit celle du début de la consécration de nos efforts fournis en continu depuis 2006. Nous avançons bien. Nous sommes passés d’une petite entreprise de 4 personnes à celle qui emploie une vingtaine chouhada de personnes entre emplois directs et indirects. Nous sommes un peu victime de notre avance. L’Algérie qui était un pays socialiste, accuse un grand retard dans les TIC, l’audiovisuel et le marketing. Mais grâce à nos efforts et notre persévérance, les gens commencent à comprendre que de nos jours le marketing est un outil à prendre en considération.
Le pays est vierge. Tout reste à faire. Notre entreprise n’est qu’une goutte d’un ensemble. Les défis sont énormes. Nous avons adopté une attitude de militants à travers notre entreprise. Nous sommes jaloux de notre pays, notre culture, nos valeurs et nos richesses. Notre problème est que nous n’avons pas assez de moyens pour mener notre politique. L’Etat n’a pas une politique claire dans ce domaine. Pour bénéficier d’une petite aide, c’est le parcours du combattant. Un rouage administratif complexe long et coûteux. Et le plus souvent, on octroie les aides sur la base de la politique du clientélisme et qu’importe si la médiocrité suit. C’est pour cela que j’ai adopté la stratégie d’électron libre. Je fais tout. Je me crée les moyens. J’imagine les projets. Je me déploie sur le terrain, je les explique, je les réalise et je me procure les moyens nécessaires. Au lieu de perdre des années à « mendier » auprès des administrations de l’Etat, je préfère l’action et la liberté sur le terrain, car dans notre domaine le temps est vraiment de l’argent.
De nouveaux projets ?
Nous abordons les choses sur des plans différents. Tout d’abord, nous avons les reportages, les clips, les publireportages, les spots publicitaires etc. Nous avons également une autre famille de produits constitée de films documentaires. Sur ce plan, beaucoup de nos documentaires sont liés à l’histoire de la Guerre de Libération nationale. Nous avons celui sur les chouhada et chefs de guerre Amar Bessalah, dit Amar El Bass, El Mohab dit Oujedouh et bien d’autres. Sur un autre plan, nous sommes une entreprise branchée sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication. Nous proposons ainsi pour les entreprises et les institutions de l’Etat, telles que les APC, un pack de communication qui est composé d’un film documentaire ou publireportage, un site web, des prospectus et un reportage photos.Nous leur  proposons aussi tout un plan, comme mesure d’accompagnement en marketing.

Et vous êtes aussi en train de réaliser une série de témoignages sur la Guerre d’Algérie ?
Effectivement, après tant de déception et de galère, nous avons lancé officiellement depuis le début de cette année, un vaste programme d’enregistrement de témoignages de moudjahidine et de tout autre personne ayant été témoin de cette page d’histoire du pays.Au nom de notre association le Flambeau, c’est depuis 2007 que nous sollicitons l’Etat en vain, pour nous octroyer des subventions. Nous avons même écrit au secrétaire de la Présidence de la République. D’ailleurs, il est le seul à avoir répondu à notre courrier. Mais aux autres niveaux, c’est reste lettre morte à chaque fois. Nous dénonçons ce mépris, cette non considération, cette ingratitude envers nos efforts notre volonté affichée en tant que jeunes actifs sur le terrain pour contribuer à l’écriture de l’histoire.
Donc, comment avez-vous lancé ce programme alors que vous manquez de moyens ?
Oui, armé de notre volonté nous nous sommes déployés sur le terrain. Au mois de décembre dernier, j’ai réuni une quinzaine de Moudjahidine, devant lesquels j’ai exposé la situation. On s’est entendu qu’on ne peut pas rester indifférents devant l’extinction successive des combattants, qui nous quittent sans pouvoir recueillir leurs témoignages.C’est ainsi que nous avons dégagé un plan triangulaire pour le montage financier. Entre famille de combattants, Mizrana Production et l’association le Flambeau, chacune des parties supporte une partie, financièrement parlant. Mais aussi, nous faisons appel à des sponsors pour nous aider. Le bilan est là. En l’espace de quatre mois nous avons enregistré et réalisé plus de 100 témoignages, alors qu’un premier livre de 300 pages est écrit. Nous avons mobilisé en tout 22 jeunes rien que pour cette opération. Nous avons filmé des moudjahidine à travers une quinzaine de communes à Tizi Ouzou. Notre programme va toucher les autres communes de la wilaya, mais aussi des autres wilayas d’Algérie. D’ici la fin de l’année, nous nous sommes tracé comme objectif d’atteindre 300 témoignages et l’écriture de 5 livres, une série qui aura pour titre « Nous avons combattu le colonialisme ».Nous avons créé une vraie dynamique chez les combattants ainsi que leurs familles qui ont bien accueilli notre programme. En plus de ces programmes, nous avons aussi d’autres projets que nous allons lancer sur le terrain, qui vont contribuer à l’écriture de l’histoire et à valoriser la Révolution algérienne. Nous sommes de ceux qui refusent cette image superficielle et trop idéologique de la Révolution. Pour nous, elle  est un socle inébranlable, une référence permanente, un enjeu important pour le présent et l’avenir de l’Algérie. Loin de toute hypocrisie, nous sommes convaincus de cette charge de participer à reprendre le Flambeau des mains de cette génération extraordinaire qui a cassé l’injustice coloniale.
En dépit de notre déception, nous restons déterminés et toute aide venant de l’Etat est la bienvenue. Car sans moyens nous avons démontré nos capacités et avec les moyens nous pouvons décupler ce programme et lancer une vraie dynamique de course contre la montre pour la collecte de données que nous allons léguer aux générations futures.
 
Et quel est votre point de vue sur cette multiplication de chaines de TV en Algérie depuis une année ?
L’ouverture audiovisuelle est officieuse. Mais je salue ce pas qui était très attendu. C’est vrai, il y a l’anarchie, la cacophonie et le manque de professionnalisme, parfois même d’éthique.C’est une course effrénée et c’est l’expression d’une frustration qui a duré 50 ans. Mais c’est positif pour nous tous. En tant que professionnel, je ne me suis pas branché vers ce nouveau monde. Je me suis approché des sièges de certaines TV, j’étais déçu par l’anarchie qui règne et j’ai refusé d’y coopérer. On attend à ce que les choses se stabilisent et que l’euphorie s’estompe.Après cela, nous les producteurs, je pense bien que nous serons en position confortable, et tous les sacrifices faits auparavant dans ce domaine trouveront leur consécration.
En plus de ceux déjà cités, avez-vous d’autres projets ?
Pour la fin de cette année et pour 2014, nous avons beaucoup d’autres projets, parmi lesquels l’installation de notre entreprise en France, mais aussi lancer des petites formations en audiovisuel et pourquoi pas, une école dans l’avenir proche.
Pour conclure ?
Je remercie votre journal qui m’a accordé cette occasion de m’exprimer. Toute ma vie, je vais la consacrer pour la communication et la culture. À travers Mizrana Production nous voulons joindre l’utile à l’agréable. Jouer un rôle utile et sur le terrain. Mizrana Production fait de plus en plus son chemin et s’impose.
Au-delà de l’aspect commercial et économique Mizrana Production est une organisation au service de la culture, la communication, l’information et la société. Toutes les suggestions sont les bienvenues et pour le faire il suffit de consulter notre page facebook ou notre site web www.mizrana-production.com. La mise en valeur de l’image de notre pays ne peut être faite par d’autres.
Entretien réalisé par Aomar Mohellebi
Source : http://lecourrier-dalgerie.com/entretien-avec-le-resalisateur-mourad-hammami/


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