Qui est Malika Arabi?
Je suis une fille du peuple, une fille issue de l'Algérie
profonde. J'ai grandi en commençant ma jeune vie dans la guerre, j'ai eu le
bonheur d'assister au recouvrement de l'indépendance, ce qui n'est pas une
mince affaire. Comparée aux liesses engendrées par un match de foot gagné de
nos jours, les liesses de l'indépendance sont décuplées. Les raisons ne se
ressemblent pas bien sûr mais c'est juste pour dire que c'est fabuleux de vivre
un tel moment. Cela ne veut pas pour autant dire que les douleurs engendrées
par une longue guerre soient effacées ou oubliées. J'ai eu le chance de faire
mes études durant les années d'or de l'enseignement en Algérie où nos
professeurs d'arabe ne nous apprenez pas comment laver un mort mais juste à respecter
les personnes âgées en particulier et l'être humain d'une manière générale et
c'est grâce à cet enseignement, à toutes les valeurs enseignées y compris par
mes parents que je suis ce que je suis aujourd'hui. Je tiens à souligner
également que je fais partie de ceux qui ont beaucoup d'amour pour la mère
patrie.
Après "Eclats
de vie" vous avez écrit un second livre qui a pour titre "Marcher
dans les pas de mon père" Pouvez-vous
nous parler de ces livres?
Ce sont deux livres
qui sont profondément liés. J'avais d'abord écrit "Eclats de vie" qui
m'a servi en quelque sorte d'exutoire dans un premier temps. J'ai tout d'abord
cru que c'était mon autobiographie et finalement à travers les échos qui me
sont parvenus de la part de mes lecteurs, il s'est avéré que c'est une
"autobiographie généralisée". Les gens de ma génération s'y sont retrouvés
et les plus jeunes y ont retrouvé des récits contés par les parents ou
grands-parents. "Marcher dans les pas de mon père" n'est qu'une suite
logique. Là aussi, l'idée m'était venue de l'écrire suite à certaines remarques
de mes lecteurs qui m'ont avoué être restés sur leur faim, il fallait une suite
et c'est ce que j'ai fait avec énormément de plaisir.
Pouvez-vous nous décrire le succès de vos œuvres ici en
Algérie et à l'étranger?
Le succès fut tel,
que je suis la première à être surprise, je ne savais pas qu'une autobiographie
d'une parfaite inconnue pouvait intéresser des lecteurs, mais finalement les
deux livres ont eu énormément de succès, ici et sur l'autre rive de la Méditerranée.
A mon grand bonheur, bien entendu.
Que pensez-vous du monde de l'écriture ici en Algérie ?
On n'encourage pas l'édition d'un livre chez nous. Editer un
livre relève d'un vrai parcours du combattant surtout quand on n'est pas connu.
Quant à la distribution des ouvrages, il vaut mieux ne pas en parler, c'est une
véritable anarchie, je dirai même c'est du n'importe quoi. Tout le monde
s'improvise distributeur et même des fois éditeur mais en réalité, ce sont
justes des titres. Rares sont les professionnels qui exercent ces métiers,
c'est la même chose pour les libraires. Ils ont sur le fronton de leur boutique
"Librairie" et quand on rentre dedans c'est à peine si on n'y trouve
pas du poulet ou autres. Les vraies librairies se comptent sur le bout des
doigts et c'est vraiment dommage.
Vos œuvres vous incitent à voyager en Europe notamment.
Quel est l’impacte de vos livres en France ?
Le fait d'écrire m'a en effet ouvert de nouveaux horizons,
je me déplace souvent en France où des associations m'invitent pour parler de
mon itinéraire, de mes livres. L'impact sur mon lectorat est bon. Il y a
beaucoup de jeunes émigrés ou Français qui ont apprécié les deux livres. J'en
suis très heureuse. Les jeunes qui n'ont pas vécu la guerre ont du mal à
s'imaginer les conditions dans lesquelles leur aînés ont grandi, quelque part
nous sommes des miraculés car la guerre n'a pas été tendre avec ceux qui ont eu
à la subir. La lecture de ces ouvrages (avec d'autres ouvrages bien évidemment)
leur a ouvert quelques parts les yeux.
Avez-vous d'autres projets d'écriture ?
Oui, j'espère continuer à écrire, des projets j'en ai, cela
me prendra un peu de temps pour les finaliser, mais c'est en cours.
Quel est votre message à vos lecteurs et les responsables
de la culture?
Mon message pour mes
lecteurs c'est : merci, merci de m'avoir soutenue. Un merci particulier à tous
mes lecteurs de l'ancien Ouaguenoun, ils ont été à mes côtés depuis le début de
cette aventure. Un très grand merci à mes anciens élèves. Quant aux responsables
de la culture, j’aimerais bien qu'ils donnent une place plus importante aux
livres car dans notre pays j'ai l'impression que le mot culture rime avec
chants et danses. Je ne mésestime ni l'un ni l'autre mais le livre doit
retrouver sa place. On doit faire aimer la lecture aux jeunes générations en
allégeant le programme scolaire et en installant des bibliothèques dans chaque
établissement scolaire qu'on mettra à la disposition des élèves pour faire
naître en eux l'amour de la lecture.
Entretien réalisé par Mourad Hammami
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire