L'ex-golden boy a été extradé de Londres où il était réfugié depuis 2003 pour être jugé pour banqueroute et détournement de fonds.


«Si Khalifa décidait de balancer des noms de personnalités jusque-là protégées, la justice serait obligée de rouvrir les dossiers et personne n'y trouverait son compte. Ni Khalifa, qui pourrait traîner en détention préventive pendant des mois, ni le pouvoir algérien, qui est en train de négocier l'après-élection présidentielle d'avril 2014.» Pour Djilali Hadjadj, porte-parole de l'Association algérienne contre la corruption, il ne faut pas se faire «d'illusions»: l'extradition de l'ancien milliardaire Abdelmoumene Rafik Khalifa, remis mardi par les autorités britanniques à Alger, ne fera pas éclater la vérité sur un des plus gros scandales financiers du pays.

L'ex-magnat algérien était réfugié depuis 2003 en Grande-Bretagne, avant d'y être arrêté en 2007 parce qu'un mandat européen avait été délivré par la France. Après avoir épuisé tous les recours auprès de la justice britannique et de la Cour européenne des droits de l'homme, le golden boy déchu va donc être présenté à la justice algérienne.
Le tribunal de Blida l'avait condamné en 2007, par contumace, à la réclusion criminelle à perpétuité pour associations de malfaiteurs et faillite frauduleuse. La Cour suprême algérienne ayant cassé ce jugement en 2012, Abdelmoumene Rafik Khalifa et cinquante autres accusés doivent bénéficier d'un nouveau procès pour banqueroute et détournement de fonds. La faillite de son empire - banque, transport aérien, bâtiment, immobilier, télévision, location de voitures de luxe - qui employait 20.000 salariés en Algérie et en Europe, avait causé un préjudice estimé par des avocats à un montant compris entre 1,5 et 5 milliards de dollars à l'État algérien et aux épargnants.

La crainte de révélations

«Mais qui peut croire que des gens comme Abdelmadjid Tebboune, ministre du Logement (il l'était déjà en 2007, NDLR), Tayeb Belaiz, actuel ministre de l'Intérieur (à l'époque ministre de la Justice) et Mourad Medelci, aujourd'hui président du Conseil constitutionnel (ministre des Finances en 2007), cités dans les dossiers ou comme témoins, seront un jour inquiétés?» ironisent plusieurs juristes. «Avec ce jeune libéral qui investit et réussit, ramène de l'argent des pays du Golfe, fréquente les stars parisiennes comme Deneuve ou Depardieu, Bouteflika tenait là une success story séduisante aux yeux des Occidentaux, analyse un officier du DRS (services secrets). Comment penser Khalifa capable de se retourner contre ce système qui l'a nourri et qui a profité de lui?»
Me Khaled Bourayou, un des avocats de la défense des coaccusés d'Abdelmoumene Rafik Khalifa, estime que si l'ex-enfant prodige de l'Algérie ne représente pas un danger, «il pourrait toutefois faire des révélations». «Soit il tait des noms, soit il choisit de dire la vérité: que l'État, des ministres et de hauts responsables ont profité de ses largesses. Une stratégie très difficile à mettre en place, qui permettrait à Khalifa de montrer qu'il n'est pas le seul coupable.» Mais le célèbre pénaliste du barreau d'Alger reconnaît aussi que «quand il le veut, le pouvoir algérien sait étouffer les affaires» et que le procès tant attendu de l'ancien homme d'affaires a été fixé à l'année prochaine… après la présidentielle.

Source:  http://www.lefigaro.fr

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