Les différentes confections ont été réalisées par des
artisans dont les capacités de tirages n’ont pas pu répondre à la
demande ; et un peu comme les tombes anonymes des deux chahids, la
couverture du livre ne porte le nom d’aucun éditeur ; et pour cause, le
livre publié en Algérie est édité à compte d’auteur. « Il y a de quoi
écrire un livre sur le livre », avait alors confié Said Sadi.
Des
langues se sont enfin déliées ; ce n’est pas le moindre des mérites de
ce livre. La 4éme édition de l’ouvrage écrit par Said Sadi sur le
colonel Amirouche, précisée et complétée, est disponible à partir
d’aujourd’hui. Epuisé depuis 8 mois, la dernière version ressort avec de
nouvelles révélations sur la façon dont Boumediene avait ordonné, dès
la fin de 1962, à Abdelhamid Djouadi, aujourd’hui général à la retraite,
et Cherif Mehdi, à l’époque responsable de la sécurité de l’armée,
l’exhumation de Bousaada des restes d’Amirouche et de Haoues pour les
enterrer à El Alia(Alger) dans des tombes numérotées anonymement. C’est à
partir de là que les restes furent encore déterrés par Bencherif qui
les a cachés dans la cave de l’état-major de la gendarmerie.
Les
menaces et les exils subis par les deux jeunes officiers - Djouadi fut
envoyé en URSS et Mehdi en Amérique latine - donnent froid dans le dos.
« Finalement ce ne sont pas deux mais trois morts qui ont été infligées
à Amirouche, Bousaada par l’armée française, El Alia et la cave de la
gendarmerie du fait de Boumediene », assène aujourd’hui Nordine Ait
Hamouda.
L’autre
témoignage, édifiant sur les méthodes du MALG, vient d’Abdelkrim
Hassani, responsable des communications de Boussouf,qui assure tout
savoir sur le dossier Amirouche et qu’il se tenait à la disposition
d’une commission du ministère de la défense ou de la présidence pour
dévoiler la vérité. On se souvient, lors de la polémique soulevée par la
sortie du livre, que Hassani, sollicité par l’auteur avait refusé de
témoigner ; il était même intervenu une fois dans la presse pour
défendre son ancienne structure. Vieux et malade, il décide « de
soulager » sa conscience en déclarant que Boumediène avait commis cette
forfaiture car il ne pouvait pas supporter que l’Algérie célèbre
d’autres noms que le sien.
Said
Sadi a retrouvé un autre acteur dont la narration écrite révèle les
objectifs de ceux qui préparaient l’après-guerre de longue date. Un
ancien officier de la wilaya V, proche compagnon de Lotfi, affirme avoir
reçu de Boussouf, en 1956, l’ordre « d’exécuter Lotfi ».
Comme
pour les versions précédentes, Said Sadi n’a publié que les témoignages
dont les auteurs acceptent de les formuler devant des témoins toujours
en vie ou par des écrits publiquement assumés.
Déjà
écoulé à plus de quarante mille exemplaires pour la seule version
écrite en français (il existe une traduction en arabe), l’ouvrage de
Said Sadi est le plus vendu depuis l’indépendance. « Les obstacles
furent pourtant nombreux. Le ministère de l’intérieur avait menacé
d’exclusion du marché de l’éducation nationale, qui représente
l’essentiel de leur chiffre d’affaires, les imprimeurs qui voulaient
produire le livre. Les différentes confections ont été réalisées par des
artisans dont les capacités de tirages n’ont pas pu répondre à la
demande ; et un peu comme les tombes anonymes des deux chahids, la
couverture du livre ne porte le nom d’aucun éditeur ; et pour cause, le
livre publié en Algérie est édité à compte d’auteur. « Il y a de quoi
écrire un livre sur le livre », avait alors confié Said Sadi.
Dans
la quatrième édition, les commentaires de la presse algérienne figurant
sur les précédentes, font miroir avec ceux de la presse française (le
Monde, le Monde diplomatique, France inter, la Marseillaise…) qui
viennent rappeler que l’ouvrage a eu une seconde vie à l’étranger grâce,
notamment, aux éditions L’harmattan (France) et Voix Libres (Québec).
Il
sera intéressant de suivre les réactions des apparatchiks du système
qui s’étaient relayés tout au long de l’année 2010 pour tenter de
disqualifier l’auteur et le livre, provoquant l’une des polémiques les
plus éclairantes du traitement de l’histoire de la guerre sur la scène
politico-médiatique algérienne.
Malek Yacini
Source: http://www.algerie-express.com
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